Première page (f) Page précédente (p) Planches contact (vignettes) Page suivante (n) Dernière page (l)
13Ariane KÜHL.jpg

Les insensés 6, 2017
encre sur papier de soie, 21 x 23 cm

Ariane KÜHL
    arianek@hotmail.fr
    75011 PARIS
    site

Ariane Kühl est une très jeune artiste plasticienne, formée à l’histoire de l’art, qui s’exprime principalement à travers le dessin. Sa série des Insensés se présente comme un ensemble de feuilles légères, translucides, de dimensions variées, pouvant dépasser deux mètres de largeur, traitées, lentement et patiemment, à l’encre de Chine noire, saturées de tracés vermiculaires d’où émergent des visages placides. Son geste créateur est obsessionnel mais répond à un schéma génésique qui engendre des formes dont on ne peut dire si elles sont animales ou végétales.
     De ces entrecroisements surgissent des physionomies sans orbites, comme des masques, plus mortuaires que vénitiens, inspirés en grande partie par la statuaire romaine. Elles paraissent et flottent, tels des fantômes en quête de libération des liens qui les retiennent, mais apparemment résignés à y demeurer pour ce qui ne peut être qu’une éternité. Elles demeurent anonymes, même si l’on peut, parfois, les assimiler aux effigies posthumes d’un Beethoven, d’un Cicéron ou d’un Caligula. Mais très vite, leur environnement reprend le dessus. Elles fusionnent avec lui et disparaissent pour reparaître ensuite, comme en recherche permanente d’une reconnaissance qui ne viendra pas.
     Ariane Kühl s’est aussi aventurée dans la troisième dimension. Sa sculpture Waldeinsamkeit – que l’on pourrait traduire en solitude de la forêt, mais qui porte tout le poids des grands écrivains du romantisme allemand – est composée en poils de coco, laine et plâtre. Elle donne un déploiement spatial à ses dessins en faisant émerger un masque humain et des globules en formes d’énormes œufs de fourmis, tous en plâtre blanc, des entrelacs d’un amoncellement de torsades qui évoquent tour à tour une gigantesque toison, un trophée jivaro démesurément agrandi ou un grand tronc d’arbre mort rongé par le lichen. Tout comme dans ses dessins, il est ici question d’apparition et de disparition, de fusion avec l’environnement et d’anonymat. Questions qui hantent chacun d’entre nous…

LD